Tilou Jean Paul

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  • Ces stats qui ne disent Rien!

    Ces stats qui ne disent Rien!

    À une certaine époque, le football se regardait. Les matchs attiraient pour les actions que les uns rappelaient aux autres avec euphorie. Les joueurs faisaient parler d’eux pour les gestes d’anthologie qu’ils sortaient de nulle part.

    Évidemment, les résultats avaient toujours compté. L’efficacité d’une équipe, le pragmatisme d’un joueur…étaient toujours reconnus, soulignés et loués.

    Mais ce qui faisait de nos discussions des passe-temps dont on ne se lassait pas, c’était plutôt l’émotion que suscitait le spectacle offert à nos yeux.

    Maintenant, les choses on changé. Si certains « fans de foot » sont encore à l’affut d’un geste technique surprenant ou bien exécuté, la plupart des « commentateurs » parlent plutôt de chiffres.

    L’importance d’une équipe et surtout d’un joueur est, de nos jours, proportionnelle aux stats qu’ils sont capables de générer. Le contenu d’un match ou l’action amenant à un but ont peu de considération. Seuls comptent: qui a marqué, qui a gagné, combien de buts, etc… Nous sommes à l’ère des chiffres.

    Et, assurés que les chiffres ne mentent pas, c’est presqu’avec suffisance que les mordus de la compta nous avancent leurs critères d’évaluation des titres et concours, sans prendre le temps, malheureusement, de constater que certaines de ces « stats » ne disent rien. Absolument rien!

    CleanSheet

    Dans une comparaison des accomplissements d’un gardien de but, on sortira souvent le nombre de « cleansheet » réalisés. Cette donnée renseignant sur le nombre de matchs joués sans encaisser de but, s’il renvoie à des faits (si le gadien a joué x matchs avec sa cage inviolée, c’est une vérité!), ne peut pas décanter les qualités des gardiens de but ni même distinguer leur meilleure performance.

    Un gardien de but protégé par une défense de fer composée de défensseurs talentueux et expérimentés aura toujours moins de chances de concéder un but que celui-là représentant le dernier rempart d’une equipe expérimentale avec des défenseurs peu aguérris et aux talents dépassant à peine la moyenne.

    Le ratio de ballons arrêtés par nombre de tirs subis semble un peu plus pertinent. Mais, là encore, il faudrait tenir compte des équipes rencontrées et des faits de jeux, comme les différentes tactiques et stratégies pour chaque match.

    Il n’est ainsi pas si difficile d’imaginer qu’un gardien ayant concédé 3 buts à une attaque de feu contre laquelle il a déjoué 5 autres tentatives, est plus méritant que celui-là ayant passé une soirée tranquille face à une équipe n’ayant cadré aucun tir.

    D’autres données entrant dans la comparaison entre joueurs posent problème: Les titres gagnés, le nombre de MOM (Homme du match), les nombres de penalty ou de coup-francs, le nombre de buts marqués donnant le titre de meilleur buteur (ce n’est pas tant la donnée elle-même qui pose problème, mais ce qu’on lui fait dire. Le terme « meilleur » me semble inadéquat. L’expression anglaise « top scorer » traduit mieux la vérité.)

    Passe décisive

    La stat la plus parlante du problème soulevé ici est la « passedé ». Après le nombre de buts, c’est l’information tirée en premier dans ces comparaisons entre joueurs de champs efficaces. Pourtant, c’est une donnée qui, prise sans autre consideration, ne veut absolument rien dire, puisque ne dépendant nullement de celui à qui il est attribué.

    Une passe décisive n’en est une qu’aprés que le recepteur ait marqué. Le passeur n’est donc pas acteur dans l’action qui dira si ses chiffres seront augmentés. C’est le buteur qui fait de la passe une passe décisive, et non le passeur. Ce dernier aura beau exécuter son geste à la perfection (techniquement et tactiquement), la passe désisive dépendra de ce qu’en fera son coéquiper.

    Que peut-on reprocher à Yussuf Ayila sur cette passe à Yakubu Aiyegbeni lors de la Coupe du monde 2010?

    inversement, certaines passes mal exécutées se voient qualifiées et comptées comme passe décisive parce que le buteur se sera démené pour concrétiser l’action. En témoigne cette passe ratée de Kilian MBappé à Benzema face à la Suisse lors de l’Euro 2020.

    Pourtant, ces chiffres-là disent que MBappé a été performant, et Ayila, pas. Vous conviendrez avec moi que ces chiffres ne reflètent pas la réalité.

    Ainsi, l’évolution du football vers une obsession des statistiques semble avoir détourné l’attention de l’essence même du jeu. Autrefois, c’étaient les moments de magie, les gestes d’anthologie et l’émotion pure qui captivaient les supporters et nourrissaient les discussions passionnées. Aujourd’hui, alors que les chiffres dominent le discours, il est crucial de rappeler que derrière chaque statistique se cache une histoire plus complexe et nuancée.

    Les statistiques peuvent fournir des indications utiles, mais elles ne peuvent pas encapsuler la totalité du talent, de la stratégie et de la contribution d’un joueur ou d’une équipe. La véritable valeur d’un joueur ne se résume pas à ses buts marqués ou à ses passes décisives, mais à sa capacité à influencer le jeu, à sa vision du terrain et à son impact sur ses coéquipiers.

    En ramenant le débat à ces aspects plus humains et subjectifs du football, nous redonnons toute leur importance aux moments de grâce et à l’émotion qui font de ce sport un véritable art.

  • Réseaux sociaux: Tours de Babel

    Réseaux sociaux: Tours de Babel

    Réseaux sociaux : Le fil de discussion ne favorise pas la réflexion, le débat et la discussion constructive. La visibilité comme principale motivation conduit à une polarisation et à une incapacité à résoudre les problèmes ensemble.

    Les réseaux sociaux (médias sociaux) tels que Facebook et Twitter ont révolutionné la façon dont nous communiquons et interagissons les uns avec les autres en ligne. Cependant, leur fonctionnement en fil de discussion peut également poser des problèmes en matière de réflexion, de débat et de discussion constructive.

    En général, les commentaires défilent et les utilisateurs ont tendance à lire au hasard quelques commentaires, en insérant ici et là leurs propres opinions. Lorsque les sujets deviennent brûlants les commentaires deviennent plus nombreux et souvent plus passionnés, ce qui peut conduire à une compétition pour être entendu et compris, plutôt qu’à une véritable discussion et réflexion.

    Ajouter à cela, la visibilité est devenue la principale motivation des utilisateurs. Une pratique sur le réseau Twitter est intéressante: Les «citations de tweets» sont souvent utilisées pour répondre à un post ou à un commentaire. Cela permet de contourner le choix du follower de consulter ou non tous les commentaires d’un compte. Avec Les «citations de tweets», le commentaire lui est imposé. Cela peut cependant tuer les débats et les réflexions qui pourraient en découler, car il devient plus difficile de suivre le fil d’une discussion cohérente. La manœuvre encourage utilisateurs à digresser et à passer d’un sujet à l’autre. Le fil directeur fait place à des pelotes emmêlées.

    Au final, en guise de commentaires réfléchis, prolifèrent des réactions impulsives qui incitent les utilisateurs à rester campés sur leurs positions plutôt que de discuter et d’apprendre des points de vue des autres. «Ces dialogues de sourds» peuvent conduire à une polarisation et à une incapacité à résoudre les problèmes ensemble.

    Tilou

  • Kreyòl pale, Kreyòl konprann!

    Kreyòl pale, Kreyòl konprann!

    Lang nou pale a rele kreyòl!

    Désolé de ne pas (plus) être d’accord pour nommer notre langue «Haïtien». 🙂

    Un certain temps, comme M. Patrice Dumont ou notre camarade BiloloKongo, je supportais l’idée que notre langue soit identifiée comme Ayitien au lieu de Créole (terme qui, selon BiloloKongo, aurait été utilisé pour comparer notre langage au cri du bœuf, mais qui, selon les dictionnaires renverrait plutôt à des métisses nés dans les colonies).

    Je n’avais pas forcément d’argument aussi séduisant et réfléchi que les leurs, mais cela me paraissait plus sensé, plus proche d’une certaine logique. Si en France on parle le Français, en Espagne, l’Espagnol,…pourquoi pas l’Ayitien en Ayiti?

    À bien y réfléchir, cependant, le mot «créole » est peut-être bien plus significatif.

    Certes, le Créole parlé en Jamaïque, celui parlé aux Seychelles ou ceux rencontrés dans d’autres parties du monde ne sont pas exactement les mêmes. Il faut pouvoir les différencier.

    Mais entre Antillais déjà, il n’est pas nécessaire d’apprendre le langage de l’ île d’à côté pour échanger et se comprendre.

    Et puis, différencier doit-il obligatoirement vouloir dire détacher? Pourquoi devrait-on s’écarter de nos frères et sœurs?

    «Nou atan ki nou pou remet lipié lor Chagos»

    Liseby Elysé

    La poignante vidéo de Liseby Elysé, témoignant des atrocités de la déportation de Diego Garcia en 1971 me conforte un peu plus dans cette position. J’entendais pour la première fois leur langue. J’ai reconnu le Créole. Les différences étaient notables mais je comprenais.

    Alors, oui: la Linguistique saura mieux expliquer les nuances entre langue, régionalisme, créole, pidgin ou sabir… Mais, sorti ce cadre technique, n’est-ce pas un joli pied de nez au sort humiliant qui nous avait été réservé?

    Comme cela s’est passé avec le mot nègre, terme utilisé pour nous humilier, nous nous le sommes approprié, l’avons anobli et universalisé. Aujourd’hui tout homme est un nègre quelle que soit sa couleur de peau. Et nous, descendants de ses nègres arrachés à leur terre, séparés et éparpillés dans différents coin du monde, avons trouvé le moyen de rester connectés: nous sommes aujourd’hui notre unis par cette langue, notre langue à tous: Le Créole!

    Source Photo: geo.fr

    https://www.youtube.com/watch?v=5WifQoW4gzA
  • Quotidien

    Quotidien

    Se lever le matin,
    comme si tout était normal.
    Se préparer, prendre la route
    comme si tout était normal.

    Commencer sa journée,
    comme si tout était normal.
    Saluer, Travailler, Décider…
    comme si tout était normal.

    Prendre sa pause,
    comme si tout était normal.
    Se restaurer, se reposer et converser
    comme si tout était normal.

    Finir sa journée,
    comme si tout était normal.
    Évaluer, Planifier, se coucher…
    comme si tout était normal.

    Ce n’est pas normal!

    Parce que la route,
    on la prend la peur au ventre.

    Parce que la journée,
    on la commence en la redoutant.

    Parce que la pause,
    elle ne repose pas de l’angoisse,

    Parce que la nuit
    est trop proche de la prochaine journée.

  • Ak tout fòs mwen!

    Ak tout fòs mwen!

    Mwen eseye ak tout fòs mwen
    Fè sa ki byen, fè sa ki bon,
    Fè sa m’ dwe fè!

    Mwen eseye ede, sèvi…
    ankouraje CHAK grenn moun
    sou wout mwen, nan vi mwen.
    ak tout fòs mwen!

    Mwen blese moun, mwen fè moun mal…
    men ak bòn volonte mwen.
    Jamè paske mwen te deside sa.

    Men jodi a mwen about.
    M’ pa kapab ankò.
    M’ p’ap kapab ankò.
    Sa pa gen sans ankò.

    Mwen p’ap pale ankò.
    Mwen p’ap ekri ankò.
    Mwen pa gen fòs ankò!

  • Vos journées de deuil, nous n’en voulons pas!

    Vos journées de deuil, nous n’en voulons pas!

    Lorsque l’on compatit au malheur de quelqu’un, on essaie d’aider à soulager la douleur. Lorsque l’on est responsable. On fait en sorte d’éviter le plus que possible ces malheurs. Compatir, c’est avoir de la compassion. Ce n’est pas prétendre en avoir.

    Ce qui s’est passé dans la nuit du 13 au 14 décembre 2021 au Cap, est un drame, mais pas celui qu’on dit.

    D’abord, le Cap (Le lieu) n’est pas en cause.
    Il ne faut pas voir le fait comme étant survenu au Cap, mais à Ayiti. Ce n’est qu’un hasard si cela ne s’est pas produit (ou pas encore) à n’importe quel autre lieu sur le territoire.

    Un camion qui pour épargner une motocyclette fait une manœuvre provoquant son renversement, des membres de la population profitant d’un accident pour voler des marchandises, la police inefficace à prévenir un danger…tout cela n’est en rien une spécificité capoise. Toutes les conditions ayant conduit au drame sont réunies partout ailleurs chez nous.

    Ensuite, Ce n’est donc pas un accident!
    Un accident est imprévisible. Ça arrive! Ce qui s’est passé hier en Ayiti, n’en est pas un. C’est une conséquence logique d’une non gouvernance, du non souci de la gestion de la circulation… de l’occupation des postes à responsabilités par des personnes n’ayant aucun souci du bien-être de leurs concitoyens et concitoyennes.

    Il n’y a quelques années, un camion, dont les freins ayant lâché, avaient causé la mort, devant le bâtiment de la télévision nationale à Delmas. Plutôt que de reprendre le programme d’inspection technique des véhicules, les autorités avaient interdits aux citoyens d’attendre leurs bus à l’endroit du drame. Comme si le problème avait été le lieu de l’accident plutôt que le mauvais état de nos voitures.

    Probablement, ce sera pareil après la tragédie d’hier soir: On aura droit, au mieux, à des simulacres de décisions, des gerbes de fleurs pour décorer des photos officielles et accompagner ces mascarades de mesures vidées de leurs sens: ces mesures de « jour de deuil », de drapeau à mi-mât…qui n’émeuvent plus personne parce qu’elles ne servent à RIEN!

  • Rèl! pou yo! pou nou!

    Rèl! pou yo! pou nou!

    Sitiyasyon frè ak sè nou yo pa chanje.
    Yo toujou nan lari. Yo toujou p’ap dòmi.

    Yo toujou oblije brave danje,
    brave lanmò!
    Pou chèche yon moso manje…
    Yon moso lespwa…
    Yon moso lavi!

    Nou pa ka, nou pa dwe,
    Nou pa gendwa pa rele!
    Nou pa gen dwa pe!

    Rèl nou se dènye fòs yo.
    Rèl nou se dènye chans yo.
    Rèl nou, pou yo
    Se yon mòso lanmou…
    Yon mòso lavi…
    Yon dènye lespwa!

    Tilou

  • Tout le monde aime Diego!

    Tout le monde aime Diego!

    Diego ne laisse personne indifférent: Soit vous aimez Diego soit vous détestez Diego…?

    Mais non. Personne ne déteste Diego!

    Certes, il a pu vous rendre triste parce que vous supportiez une équipe jouant contre la sienne. Il a pu vous faire mal en brillant contre votre équipe. Il a pu profiter de certaines faiblesses d’arbitrage, comme il en a aussi été victime. Ce sont les règles et les principes du jeu.

    Mais personne ne peut détester un joueur qui avait tout pour lui: la technique, la force, la vitesse, la créativité, la soif de faire gagner son équipe, la joie de jouer, le plaisir de toucher le ballon, le sourire généreux d’un artiste.Diego Maradona, «El Diego de la Gente».

    Notre Diego. Notre Diego à tous. Diego ne laisse personne indifférent: tout le monde aime Diego!

  • Dialogue national ou Pacte des pilleurs?

    Dialogue national ou Pacte des pilleurs?

    Beaucoup pensent que la division est la véritable source de tous les maux qui traversent notre pays. Certains croient qu’une entente entre les acteurs politiques pourrait nous sortir de cet enlisement dans la pauvreté.

    Ainsi, il n’est pas rare d’entendre des messages d’entente, des appels au dialogue et au compromis. Et ceci, même des principaux concernés.

    Tous les acteurs politiques de quelque camp que ce soit en font leur slogan.

    Bon, pour faire original, chacun y va de son expression. Si certains disent bien “dialogue”, d’autres préfèrent “conférence” et d’autres encore “table ronde”. (Je vous fais grâce des “woumble”, “chita pale”, etc.)

    Mais l’idée est là. Et vu l’urgence, ça reste un détail. L’important, c’est qu’ils réclament tous une certaine concertation. Et c’est sans doute la seule position des acteurs politiques qui fait plaisir à tout le monde…à part moi !

    Bah…non ! Moi, je ne vois pas cette affaire d’un bon œil. Alors, là, pas du tout !

    Ce n’est pas que je sois confortable avec les querelles gratuites (pas pour nous tous, évidemment. Genyen ki byen touche pou sa), mais, à force de débattre sur les possibilités, l’opportunité et les modalités d’une entente, on oublie le plus important : S’entendre sur quoi ?

    Et là, rien qu’imaginer le sujet de leurs discussions et le terrain d’entente possible me donne des frissons.

    Réfléchissons… On ne négocie que sur nos désaccords, non !? Ce qui nous met d’accord n’est pas sujet à discussion, encore moins à des compromis. Or, leurs divergences n’ont toujours été qu’à propos de qui dirigerait l’ONA, l’APN ou tel autre « bwat » de l’État. Il n’est jamais question d’idéologie ; le problème ne s’est jamais posé en termes de choix d’investissement industriel, de programme scolaire ou de projet agricole. Sur ces points, ils s’entendent déjà. En tout cas, leurs discours ne témoignent d’aucune contradiction. Ils sont TOUS d’accord qu’il faut TOUT faire: « fòk gen plis envestisman pou bay travay », « fòk gen plis lekòl », « fòk nou relanse agrikilti »,…les mêmes solutions sont prônées par tous.

    Par contre, chaque camp accuse les autres de vols, de gabegie, de corruption, de malversations et surtout de vouloir s’accaparer de toutes les richesses sans rien laisser aux autres. Leurs désaccords ne résideraient-ils donc que dans la séparation du gâteau ? Et une éventuelle entente devra-elle traiter de comment plumer la poule ?

    Vous commencez à comprendre…  Vous imaginez bien que les loups ne vont pas s’allier pour le bien-être des moutons. Le résultat pourrait plus s’apparenter à un pacte entre loups, qu’à une feuille de route pour le bien du pays. Ça me fait peur, je vous dis !

    Bon, la seule opportunité que cela pourrait offrir, si les accusations des uns et des autres tiennent, évidemment, c’est une bonne provision pour les coffrer tous, et d’un coup, pour association de malfaiteurs. Exactement comme dans les films policiers d’Hollywood. On attend qu’ils soient tous réunis pour leur Dialogue et la cavalerie débarque : “Hauts les mains ! Vous êtes en état d’arrestation !” Quel joli coup de filet ce serait.

    Mais bon, il ne faut pas trop rêver non plus, Il faudrait bien plus que ce simple filet pour attraper des requins qui s’allient pour garder les ressources de l’Océan.

    Tilou

  • La proposition de sortie de crise de Valéry Numa est-elle réaliste?

    La proposition de sortie de crise de Valéry Numa est-elle réaliste?

    Les 6 et 7 juillet 2018, en colère contre une tentative d’augmentation des coûts de l’essence à la pompe, une partie de la population ayitienne s’en est prise à des magasins, banques et autres entreprises, pour exprimer leur mécontentement du coût de la vie.

    Depuis, surfant la fièvre du PetroCaribe Challenge, (mouvement sur les médias sociaux réclamant une enquête sur la gestion d’un fond pour le développement), une partie de l’opposition réclame le départ du président de la république d’Ayiti, Jovenel Moïse.

    Après les manifestions du 18 novembre 2018 et la semaine de blocage qui s’en suivit, l’issue de la crise est devenue préoccupante.

    Dans ce contexte d’incertitude, Valéry Numa, journaliste très connu et « leader d’opinions » fait une proposition de sortie de crise en 7 points.

    L’intention est probablement louable, les mesures proposées sont, par contre, irréalistes et incohérentes. (Les explications sont insérées dans la proposition de M. Numa que nous faisons suivre)

    POUR UNE SORTIE DE CRISE RÉALISTE ET SANS VIOLENCE (Valéry Numa)

    1.- Jovenel Moise reste au pouvoir

    En fait, il reste président, mais sans aucun pouvoir. Les explications, en conclusion.

    2.- L’opposition plurielle choisit un Premier Ministre et monte le gouvernement

    Et déjà une impasse ! Qui fait partie ou ne fait pas partie de cette opposition? Quel mécanisme peut garantir un « consensus » entre des groupes qui ne s’entendent sur presque rien? (Sauf peut-être le départ du Président que le point 1 écarte d’entrée de jeu.)

    3.- Les Petro Challengers (à identifier et désigner) mènent l’enquête de proximité sur les nouveaux membres du gouvernement.

    À identifier et à désigner? Mais par qui? Vu la nature même du challenge, en désigner des membres pour les représenter reviendrait carrément à faire des élections nationales générales.

    De plus, des institutions sont déjà prévues pour attester des bonne vie et mœurs des citoyens.

    4.- Les principaux chefs de fil et de partis de l’opposition entérinent le choix du Premier Ministre et des membres du nouveau gouvernement (signature à l’appui)

    Mêmes commentaires que le point 2.

    5.- Dissolution de la 50ème législature ou sa transformation en Assemblée consultative (À définir / Jeton de présence en guise de frais)

    C’est le point le moins difficile à mettre en œuvre, mais aussi le plus intriguant. Pourquoi vouloir sauver la présidence en sacrifiant le parlement? Pourquoi monter un gouvernement en le soustrayant de son autorité de contrôle?

    6.- Le nouveau gouvernement présente sa feuille de route à la nation.

    Évidemment, il ne peut pas la soumettre devant le parlement s’il n’existe plus. Alors « devant la nation » veut dire quoi? Référendum? Simple point de presse?

    7.-Les priorités :
    a) Pacifier et réconcilier le pays
    b) Envisager la tenue de la conférence nationale souveraine
    c) Repenser notre constitution
    d) Initier les démarches correctes en vue de la tenue du procès Petro Caribe
    e) Organiser des élections générales anticipées dans 18 à 24 mois

    Bien que certaines priorités ne soient que vaguement définies, elles concernent effectivement des préoccupations du moment. Il est par contre à noter que le coût de la vie, principale raison des violences de Juillet, et ayant initié la crise, n’est pas mentionné.

    Appréciation et conclusion

    Cette proposition sauve uniquement le mandat du président ayitien. Et encore, uniquement sur l’aspect de la durée. En effet, le gouvernement sensé appliquer la politique du président lui est TOTALEMENT étranger. Dans les choix (2) et la validation (3). Ce serait même un pied de nez à la démocratie que de museler un président (élu), de dissoudre une législature (élue) (5), pour remettre une gouvernance sans contrôle à des partis ayant été refusés par le peuple. Même dans le cas d’une « cohabitation », le gouvernement émane de groupes ayant reçu une adhésion par les urnes.

    La stabilité politique passe par la stabilité institutionnelle (autant de la présidence que du Parlement, des Mairies, des tribunaux, etc.) et, SURTOUT, par le respect de la Loi. Et s’il fallait vraiment passer par une transition, ne vaudrait-il pas mieux appliquer les prescrits de la Constitution (articles 148, 149) et rester dans le cadre légal ?